1. Un jeu en ligne pour tous

 

(Note de la rédaction : cette interview a été originellement publiée sur le site Wii.com japonais en juillet 2009.)

Iwata :

Merci de nous avoir rejoints aujourd’hui.

Tsujimoto/Fujioka :

Merci à vous de nous recevoir.

Iwata :

Certains de nos lecteurs vont se demander ce qu’il se passe vu que je me mets à interviewer des personnes travaillant chez d’autres éditeurs. Mais en réalité, vous avez fait de si beaux efforts sur ce titre que j’ai envie de faire connaître à un maximum de personnes les points forts de ce jeu. C’est pourquoi je vous ai demandé de faire tout ce chemin pour venir nous voir ici à Kyoto. Je crois que ce serait vraiment intéressant d’aborder cette discussion sous un angle différent de ce que l’on fait d’habitude.

Tsujimoto/Fujioka :

D’accord, avec plaisir.

Iwata :

J’aimerais commencer par un tour de table. Tsujimoto-san, vous voulez bien commencer ?

Tsujimoto :

Bien sûr. Je m’appelle Tsujimoto et je suis producteur sur Monster Hunter Tri.

Fujioka :

Et moi, je m’appelle Fujioka. Je suis le directeur.

Iwata :

Sur quels projets étiez-vous avant de commencer Monster Hunter Tri ?

Tsujimoto :

J’ai commencé chez Capcom en tant que responsable planning pour les jeux d’arcade. Ensuite, je suis passé aux jeux grand public. J’ai été chargé du planning des titres en ligne, des jeux de course surtout.

Iwata Asks
Iwata :

C’était au moment où les jeux en ligne ont commencé à décoller ?

Tsujimoto :

Oui, c’est ça. Pour le premier Monster Hunter, j’étais chargé du planning et des aspects administratifs du jeu en ligne.

Iwata :

Quand êtes-vous devenu producteur ?

Tsujimoto :

Je suis devenu producteur à part entière au moment où la série est sortie sur console portable, en 2007.

Iwata :

Vous êtes donc un producteur doté d’une bonne expérience du terrain.

Tsujimoto :

Tout à fait.

Iwata :

Et vous, Fujioka-san ? Racontez-nous votre parcours.

Fujioka :

Je suis entré dans l’entreprise en tant que game designer arcade. Je faisais principalement des animations en pixels.

Iwata Asks
Iwata :

Comparé au game design tel qu’on le connaît aujourd’hui, c’était une époque radicalement différente.

Fujioka :

C’est vrai. (rires) Mais cela m’a permis d’étudier l’animation et, pour tout ce qui concerne l’expression du mouvement, je pense que les problématiques ne sont pas si différentes que ça aujourd’hui. J’arrive toujours à dessiner en tenant compte de l’importance du mouvement, comme je l’ai appris à cette époque. En fait, je suis bien content d’avoir pu étudier ces bases.

Iwata :

Oui, c’est vrai que ceux qui ont appris à la fois les méthodes de l’époque et les méthodes actuelles ont un dessin plus riche, leur travail révèle une plus grande profondeur.

Fujioka :

C’est exact. Je travaillais surtout sur des jeux de combat, puis l’entreprise a décidé de s’investir sérieusement dans le développement de jeux en ligne. Le jeu n’avait pas encore de titre officiel à cette époque, mais tout le monde a été affecté à ce que l’on peut actuellement définir comme l’équipe Monster Hunter. Ils voulaient que je garde un œil sur les designers juniors.

Iwata :

Vous étiez donc comme un conseiller au début. Comment êtes-vous devenu directeur ?

Fujioka :

A vrai dire j’étais celui qui râlait toujours sur les contenus du jeu et ils ont fini par me dire : « Eh bien, si vous y tenez tant que ça, pourquoi ne pas devenir directeur, tout simplement ? ». (rires)

Iwata :

Oh, je vois. (rires) L’entreprise est prête à confier d’importantes responsabilités à des jeunes pleins d’énergie, du moment qu’ils sont enthousiastes. C’est comme ça que ça fonctionne chez Capcom ?

Fujioka :

J’imagine, oui. (rires) Mais je voulais rester un designer. De plus, j’ignorais ce qu’était censé faire un directeur. Mais tout le monde m’a encouragé à accepter, alors j’ai décidé de relever le défi et de voir comment ça se passait. Enfin bref, d’une façon générale, on peut parler de deux séries de Monster Hunter.

Iwata :

Les versions pour consoles de salon et les versions pour consoles portables.

Fujioka :

Exactement. Je suis directeur sur la série pour consoles de salon, mais j’ai aussi supervisé les versions pour consoles portables.

Iwata :

Comment la création de Monster Hunter a-t-elle commencé ?

Iwata Asks
Fujioka :

Comme je le disais un peu plus tôt, l’entreprise a décidé de s’impliquer sérieusement dans les jeux en ligne. On avait donc le jeu de course sur lequel Tsujimoto a travaillé, et un titre se rapprochant d’un dérivé de Resident Evil. Et puis, en voulant mettre plutôt l’accent sur les aspects « action musclée » des jeux, on a décidé de faire Monster Hunter.

Iwata :

Le premier titre pour consoles de salon est sorti il y a cinq ans, en 2004. A quel moment avez-vous commencé la planification ?

Fujioka :

Cela fait sept ans.

Iwata :

Y a-t-il un élément du concept original qui n’a jamais changé durant ces sept années ?

Fujioka :

Oui, c’est le concept selon lequel

Video: il faut que tout le monde s’y mette pour vaincre un énorme monstre

(Note de la rédaction : cette interview a été originellement publiée sur le site Wii.com japonais en juillet 2009.
il faut que tout le monde s’y mette pour vaincre un énorme monstre .

Iwata :

Lorsqu’on ne parvient pas à faire une chose seul, il faut se trouver des alliés.

Fujioka :

Exactement. Comme les monstres se déplacent au sein de leur environnement, il faut un véritable travail d’équipe pour pouvoir les vaincre. Ensuite, vous pouvez récupérer des matériaux, comme la peau ou les défenses du monstre, et en faire de nouveaux équipements pour votre personnage. C’était le concept depuis la toute première phase de développement.

Tsujimoto :

Le tout premier concept consistait à mettre en avant un « jeu d’action en ligne », mais on a toujours ajouté « où tout le monde peut jouer ». C’était un point très important. Car en général, quand on parle de jeux en ligne, on s’imagine des gens qui s’immergent totalement dans ces univers virtuels, de vrais fanatiques. Seulement, nous, avec ce jeu, nous visions une plus grande liberté de mouvement. Ainsi, on a tenté de créer une atmosphère où, si l’on aime

Video: faire la cuisine

(Note de la rédaction : cette interview a été originellement publiée sur le site Wii.com japonais en juillet 2009.
faire la cuisine , cela ne pose aucun problème. On a aussi fait en sorte que ceux qui aiment la pêche puissent s’en donner à cœur joie.

Iwata Asks
Iwata :

Ce que vous dites sur la pêche me fait penser à Animal Crossing. (rires)

Tsujimoto/Fujioka :

(éclat de rire)

Iwata :

Bien sûr, l’aspect et le système du jeu sont complètement différents, mais il y a en effet des similitudes dans le concept de base.

Fujioka :

Effectivement. Tout le monde se connecte au même univers, mais les gens ne sont pas obligés de tous faire la même chose. Chacun peut faire ce dont il a envie. Mais lorsque le groupe atteint un objectif, tout le monde en bénéficie.

Iwata :

Les gens ont la liberté de faire ce qu’ils préfèrent.

Fujioka :

Oui. On a fait en sorte que le joueur n’ait pas besoin de trop de temps pour pouvoir jouer. Ainsi, chaque quête1 ne prend pas plus d’une heure. Les jeux en ligne de l’époque avaient tendance à demander beaucoup plus de temps. 1Quête : mission au cours de laquelle un chasseur doit vaincre des monstres, transporter des marchandises, rassembler des objets, etc. Une fois la quête réussie, le chasseur se voit attribuer une récompense.

Iwata :

Pourtant, les joueurs qui jouent longtemps deviennent plus forts, acquièrent la réputation d’être vraiment très talentueux.

Fujioka :

C’est vrai. Nous voulions changer cela autant que possible, même si ce n’était qu’un tout petit peu. C’est pourquoi nous avons raccourci le temps nécessaire pour terminer une quête. Par exemple, si quatre joueurs s’engagent dans une quête, mais qu’un joueur dit « Cette fois-ci, je veux juste pêcher, » et que les autres sont d’accord, ils peuvent très bien s’organiser comme ça.

Iwata :

Le jeu fonctionne, même si l’un des joueurs ne participe pas activement à la quête.

Fujioka :

Depuis le tout début cela a fait partie des bases du game design de Monster Hunter.